Âmes sensibles ne pas s’abstenir

 

Interview de  Cindy Paul par France Yorel 

photos: Cindy Paul

 


Le chien est considéré comme un membre de la famille par de nombreuses personnes.


On dort avec lui, on le gâte, on lui parle, on joue, on fait de multiples activités ensemble, et pour finir, on l’emmène voir le vétérinaire au moindre bobo.


Notre chien, on l’aime et il nous le rend bien, mais dès qu’un problème surgit, on s’inquiète pour lui et cette inquiétude, ce stress, on le lui transmet.

A force d’aimer trop nos chiens, une transformation s’opère et ils ne se reconnaissent plus toujours dans leur rôle de chien.

Cindy, une passionnée de jack russell, en a fait dernièrement l’expérience, c’est ce que j’ai choisi de  vous raconter.

 

Cindy aime tellement les jacks qu’elle en a toute une tribu.

 

Quand Bimbo, l’une de ses chiennes, est sur le point de mettre bas, Cindy s’apprête à endosser le rôle de sage-femme, bien que pour elle, ce soit une grande première.

 

Le stress monte, et toutes sortes de questions lui trottent dans la tête.

 

Elle appelle une amie pour se donner de l’assurance, et, à  peine le téléphone raccroché, le premier nouveau-né  pointe le bout de son nez.

 

Cindy sait bien que ce moment tant redouté va arriver, mais ce que l’on redoute arrive toujours trop  tôt.


Le sentiment le plus pregnant pour une personne qui aime son chien est sans doute la peur.

 

Peur que ça se passe mal, peur de ne pas gérer, peur de voir son chien souffrir par notre faute, peur de ne pas comprendre certains comportements et vivre dans le doute continu que tous les bébés se portent bien.

 

Finalement, quand on se retrouve seul à gérer une situation difficile, on n’a plus le temps de penser et on fait au mieux. Une fois que la mise à bas a débuté, on ne peut plus reculer et on prend sur soi. C’est ce que fait  Cindy pour sa chienne.

 

Bimbo tremble, m’attrape le bras, je dois me faire violence pour gérer le stress qui monte et ne pas lui montrer que j’ai encore plus peur qu’elle.

 

Nul ne sait si une chienne comprend ce qui lui arrive lors de son accouchement, mais elle se laisse guider par sa personne de confiance, comme un enfant se laisse guider par ses parents.

 

Pour le premier bébé, moi comme elle, on est hésitantes, on ne sait pas comment faire. La pauvre n’a pas l’air de comprendre ce qui lui arrive, et moi, j’ignore à quel moment je dois l’aider.

 

Le premier petit arrive par les pattes.

 

Le vétérinaire avait prévenu que la plupart des bébés de Bimbo se présenterait par les pattes, mais Cindy n’en sait pas plus.

 

Plus le temps de réfléchir, Cindy tire en essayant de ne blesser ni le nouveau-né, ni la mère.

 

Les pattes arrivent, on tire comme on peut, c’est gluant cette chose.

 

Trois poussées plus tard, le bébé est dehors. Bimbo le regarde, le lèche mais ne troue pas la poche.

 

Cindy décide de le faire à sa place et la jeune maman lèche son petit pour souder entre lui et elle un lien de tendresse.

 

Ouf! Il respire. La pression retombe un peu. Il est tellement beau !

 

Le cordon pendouille et Bimbo ne s’en occupe pas non plus.

Cindy le fait à sa place en espérant que c’est le bon geste à faire.

 

La sage-femme improvisée vient à peine de changer les alaises que Bimbo pousse à nouveau.

 

On refait la même chose puisque ça a bien marché pour le premier.

Voilà le second!

Je perce la poche, Bimbo  lèche son bébé mais  elle ne coupe toujours  pas le cordon et les pattes du petit deviennent mauves. Je coupe et masse les petites pattes. Je le frictionne un peu car il semble avoir plus de difficultés que le premier. Je place son museau sur les mamelles, et il tète. Ouf!

 


Seul à gérer

une situation difficile, on n’a plus le temps

de penser. Alors, on fait au mieux.

 

L’opération se répète et se répète.

Cindy prend de l’assurance.

Bimbo pousse, Cindy tire puis perce, Bimbo lèche et Cindy coupe…
Tout ce petit monde tètent à peine sorti du ventre de leur mère!

 

Cindy est tout simplement émerveillée.

 

Les naissances, la complicité avec sa chienne, c’est juste magique.

 

Mais cela n’est pas terminé. Les chiennes ont généralement quatre à huit petits, parfois plus.

 

Bimbo  se soulage, boit et mange entre deux naissances. Elle fait même  une pause de près d’une heure après le cinquième.

 

Cindy en profite pour appeler son vétérinaire:

 

Je lui demande  si c’est normal qu’un seul placenta soit sorti 10 minutes après le troisième chiot. Il me rassure et me dit qu’un chiot pourrait encore naître demain matin.

Pourvu que non!

 

Cindy n’a pas à attendre le lendemain, les deux derniers font leur apparition à dix-sept minutes d’intervalle.

 

En tout, il y en  a sept et ils respirent tous. Cindy pense que le fait d’avoir aidé Bimbo lui a épargné de la fatigue et du stress.

 

Bimbo est une jeune mère qui découvre son rôle, elle a tout à apprendre.

 

Au début, elle se couche sur ses bébés, ils sont si petits! On a peur, on les lui retire et on les place devant elle. On surveille beaucoup...  trop peut-être.

 

Bimbo est nerveuse et semble ne pas savoir se comporter avec ses chiots. Quand l’un deux pleure parce qu’il est trop loin d’elle, elle gémit en regardant sa maîtresse. Alors, Cindy  lui apporte le bébé pour éviter de déranger les autres qui sont en train de téter.

Très vite, Bimbo a un comportement bizarre, elle pleure devant ses bébés, gratte le divan, et accepte que tous les autres chiens s’approchent.

Cindy pense que Bimbo est angoissée parce qu’elle ne trouve pas sa place de  maman chienne. Cindy l’a toujours couvée, elle manque d’autonomie.

Une maîtresse trop présente, qui fait tout à sa place, qui la dirige, ce n’est pas fait pour l’aider, même si cela part d’un bon sentiment.

 

Dans le quotidien, quand cela ne les perturbe pas, ce n’est rien, mais quand des situations font appel à leur instinct, il faut bien s’adapter.

 

Pour évoluer et être une bonne mère, Bimbo doit se débrouiller et protéger ses bébés toute seule.

 

Riche de cette découverte, Cindy téléphone à son vétérinaire qui confirme ses pensées.

 

Cindy déplace alors la couche de Bimbo dans un coin de la maison, à l’écart des autres chiens, avec ses propres gamelles, et elle prend sur elle pour la laisser tranquille.

 

J’y vais juste quand ça hurle, au cas où l’un d’entre eux serait coincé sous la couverture. Mais je la laisse gérer.

Parfois, quand elle dort profondément et qu’un petit pleure, je le lui rends sans qu’elle ne s’en rende compte, mais c’est tout. Je ne les porte que pour les peser.

 

Cindy a raison, car en peu de temps, une amélioration s’opère: chacun trouve sa place, les autres jacks comme la nouvelle maman.

 

Finalement, laisser Bimbo gérer la situation au calme fait d’elle une bonne mère, très capable, même si ce n’était pas évident au début. Bimbo est habituée à s’en remettre à sa maîtresse, elle manque d’indépendance.

 

C’est sensible un chien!

Depuis hier, Bimbo sort plus et joue. Elle vient près de nous et retourne les nourrir quand il le faut. Elle semble se sentir bien et cela me rassure.

 

L’expérience que vient de vivre Cindy est unique.

Cette maîtresse admirable a compris qu’être trop présente perturbait sa chienne.


Lors des naissances, je pense que Bimbo en avait besoin, (à cause de ma mauvaise éducation) , mais il a fallu lui apprendre en un temps record à se débrouiller seule. Si je ne l’avais pas fait, le vétérinaire pense qu’elle aurait pu les abandonner.

 

Nous sommes tous confrontés à ce dilemme quand nous aimons nos chiens, et il n’est pas facile d’accepter de laisser nos compagnons jouer leur rôle de chien tant ils semblent nous comprendre et vivre en parfaite harmonie avec nous.

 

Après une semaine, Cindy fait le point:

 

Même si cette expérience est magnifique et que je me réjouis de cajoler les petits, de prendre le temps de leur trouver une bonne famille, c’est aussi beaucoup de stress. Jamais je ne me serais imaginée cela, je me demande même comment c’est possible!

Mon envie d’avoir un petit de Bimbo était plus forte que la raison. Mais plus jamais je ne le ferai, et je comprends encore moins les gens qui n’ont pas de peine de voir leur chienne faire portée sur portée...

 

Cette belle histoire est terminée et une nouvelle vie débute pour les bébés de la courageuse Bimbo.


Quant à nous , nous avons appris que notre éducation n’est pas toujours à la hauteur, mais comme le dit parfaitement Cindy:

 

Le principal est de s’en rendre compte, beaucoup préfèrent tout mettre sur le dos de leur chien!

 

 

© CELSIUS Prod, SABAM2019

Découvrez une autre histoire de jack russel en cliquant

sur la photo ci-dessous

Loulou se fait stériliser